
Et si notre vision moderne de l’atome n’existait pas ? Si les électrons, les couches d’énergie, ou même la mécanique quantique n’avaient jamais été formulés ainsi ? Derrière les grandes théories du XXe siècle se trouve une figure majeure mais parfois méconnue : Niels Bohr. C’est lui qui, en 1913, propose un modèle révolutionnaire de l’atome — avec des électrons en orbites quantifiées — capable d’expliquer enfin les spectres lumineux, là où la physique classique échouait. Une idée qui ouvre la voie à toute la physique quantique moderne.
Mais Bohr ne s’est pas arrêté là. Au cœur de l’institut de Copenhague qu’il fonde, il invente une nouvelle façon de faire de la science : collective, dialoguée, ouverte aux désaccords. Il élabore le principe de complémentarité, s’oppose à Einstein dans des débats historiques, et participe à la naissance de l’interprétation de Copenhague. Sa vision, à la fois rigoureuse et philosophique, redéfinit les règles du jeu en physique : l'observation devient inséparable de la théorie, le langage classique ne suffit plus, et l’incertitude n’est plus un défaut, mais une propriété fondamentale.
Enfin, Bohr traverse le XXe siècle en acteur engagé. Lors des guerres mondiales, il prend position, protège des réfugiés scientifiques, rejoint le projet Manhattan à contrecœur, puis plaide pour une gouvernance mondiale de l’énergie nucléaire. Toute sa vie, il aura cherché à faire de la science non pas une simple quête de vérité, mais un outil de responsabilité. Comprendre l’atome, pour lui, c’était aussi comprendre notre place dans l’univers — et notre devoir face aux choix qu’impose cette connaissance.