
Et si on arrêtait de confondre démocratie et mise en scène du pouvoir ? Dans ce Take, Alice de Rochechouart, philosophe, militante et autrice de Privilèges – Ce qu’il nous reste à abolir (éditions J.-C. Lattès), démonte une illusion profondément ancrée : celle d’un régime où le peuple déciderait vraiment. Alice observe avec lucidité les mécanismes qui structurent nos sociétés, analyse les récits imposés et questionne le rôle de chacun dans le maintien des systèmes de domination. Son travail invite à dépasser le fantasme d’une démocratie idéale pour comprendre les dynamiques réelles du pouvoir.
Parce qu’en réalité, nous ne vivons pas en démocratie. Nous vivons dans un système de délégation : nous remettons notre pouvoir à des représentants qui prétendent nous incarner, et qui, une fois élus, gouvernent sans nous consulter. L’élite politique, économique et médiatique détient les leviers, façonne les discours, organise l’oubli des luttes gênantes et fabrique les normes du possible. La participation électorale, même massive, se heurte à des structures rigides qui limitent le véritable impact des choix citoyens. Les manifestations, aussi visibles soient-elles, sont encadrées, surveillées, parfois criminalisées, souvent absorbées par l’ordre qu’elles cherchent pourtant à contester.
Alice rappelle que la liberté d’expression, telle qu’on nous la présente, est largement symbolique : on peut parler tant que l’on reste dans les bornes du convenable, tant que l’on n’attaque pas les intérêts établis. Dès qu’une voix dérange réellement, le système se défend. Cette “liberté” n’est pas un droit absolu, mais un espace contrôlé où les contestations qui menacent l’ordre sont neutralisées.
Alors, que faire pour ne pas rester spectateurs ? Pour Alice, reprendre du pouvoir, ce n’est pas seulement voter à intervalles réguliers : c’est retrouver des moyens d’action réels, tangibles, capables de bousculer les structures établies. La grève générale, le blocage, le sabotage ne sont pas des excès ou des dérives : ce sont des gestes politiques qui forcent le système à répondre, à se confronter à la contestation. Ces actes sont diabolisés parce qu’ils perturbent la routine, parce qu’ils révèlent le déséquilibre réel du pouvoir et obligent à regarder en face les privilèges accumulés.
La démocratie n’existe pas sans conflit, sans risque, sans rupture. Tant qu’on ne dérange pas, rien ne change. Tant qu’on accepte le confort de l’illusion démocratique, le pouvoir continue de s’exercer à notre place, et la hiérarchie des forces reste intacte. Et si la véritable liberté politique, ce n’était pas seulement voter, mais oser agir là où le système ne nous attend pas, là où nos choix prennent réellement forme et impact ?
Alice de Rochechouart nous rappelle qu’il ne suffit pas de critiquer ou de dénoncer. Retrouver du pouvoir, c’est inventer de nouvelles stratégies d’action, réapprendre à prendre des risques collectifs, à remettre en question les routines sociales et les institutions. C’est affronter la peur de l’illégalité, de la sanction, mais aussi la peur de la rupture : car aucun changement durable ne se fait sans confrontation avec le réel. Et toi, t’en penses quoi ?
Café Cash, c’est quoi ?Un podcast court, pop, lucide et engagé, qui donne la parole à celles et ceux qui pensent à voix haute, dans un café, un PMU, un bar ou un bistrot. Pas d’interview classique. Pas de débat de plateau. Juste un micro tendu à des voix singulières qui bousculent les récits dominants et redonnent du sens à ce qu’on croit savoir.
Merci à Alice de Rochechouart pour son regard lucide et radical,
à @subwaytakes et à Kareem pour l’inspiration et le format original,
à @camille_de_cussac pour le micro,
à @madamepervenche pour l’accueil.
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