
Comment en suis-je venue à m'interroger sur le mot 'essence' ?
Ah oui, j' étais avec l'énergie de 'sois toi et change ton monde' et surgit cette question : "Quelle est l'essence de ton être ?"
Et puis l'itinéraire de ce mot si précieux, si essentiel dans son sens premier 'le fond de l'être', si majestueux dans son sens second 'espèce d'arbre' et finalement réduit par la modernité pragmatique à sa forme la plus désenchantée, celle que nous pompons dans les stations service.
Alors, je me dis quelle gabegie, quelle déchéance, tout ça pour ça.
Et puis non, il n'y a pas que cela. Il n'y a pas que cette réduction ironique du mot 'essence' par l'humain moderne.
Bien sûr, rapidement je joue avec les sons - l'essence, les sens.
Et puis j'extrapole : essence, naissance et connaissance.
Et le mot 'essence' retrouve son espace, immense, sa légèreté aussi.
Il vit, il pétille.
Et je m'amuse à observer combien les mots n'en finissent pas de se faire l'écho des autres, de se répondre - ce qu'ils ont l'air de s'amuser, ils jouent à cache à cache, ils se miment les uns les autres, se donnent des airs de trompe-l'oeil.
Vraiment j'en suis à me demander s'ils ne font pas tout cela exprès, les mots, juste pour nous perdre dans leur labyrinthe - leur pied de nez à nos tentatives de les ranger dans des boîtes, elles-mêmes gardées dans des tiroirs, eux-mêmes alignés dans un meuble.
Cet enchâssement qui voudrait ordonner le jeu des mots et le chaos qu'ils sèment.
Et si c'était pour cela que les mots me sont si indispensables ?
A cause de leur indomptabilité, de leur implacabilité, de leur liberté éhontée et libertine, libertaire aussi, de leur beauté ineffable d'être hors définition car toujours, n'en déplaise aux Larousse, Quillet, Webster-Merriam, Longman et toute la clique, ils sauront déjouer les attendus et s'attifer différemment, imprévisibles toujours dans les sens qu'ils vont générer. Les mots sont des êtres formidables.
Et si nous nous inspirions d'eux pour mener notre vie ?