Étrange cette seizième étape avec ce mot de liberté.
Comme reportée.
Parce que trop démesurée ?
Liberté -
Sur cette pierre, je me suis élevée.
Liberté de dire, de faire.
Liberté à être.
Que je ne sais dire en mots.
Parce que, par eux, trop disséquée et limitée ?
Parce que tant de fois appelée, invoquée, désirée ?
Parce que le plus souvent délimitée
Par ce qu'elle n'est pas ?
L'état de n'être soumise à rien ni personne,
De ne subir aucune contrainte ou pression,
De n'être ni captive ni emprisonnée.
Parce qu'elle est compartimentée et étiquettée
Comme liberté de parole, d'expression, d'opinion ?
Ou encore liberté de circulation, d'association ?
Comme si la préciser atténuait le vertige
Qui s'empare de moi lorsque d'elle je me réclame.
Parce qu'elle est si souvent adjectivée,
En libertés adverses dévoyée,
Comme la liberté individuelle ou publique,
Comme la liberté citoyenne ou politique ?
Et que dire de la liberté économique
Devenue le tombeau de tant de libertés ?
Est-ce parce que la liberté, d'une illusion est née ?
Que savent les oiseaux de cela ?
Que sais-je de cela ?
Liberté sans nom, à cheminer.
Impertinence, ce mot venu à mes lèvres ce matin.
Comme le contraire de pertinence.
Non, non, non !
A moins que l'impertinence ne soit la pertinence de la non pertinence ?
Ou la perte de la pertinence ?
Ou bien encore la perte de l'abstinence ?
Oui, là je perçois l'espace des possibilités ouvert par le mot IMPERTINENCE !
Et si je devenais l'impertinence la plus totale ?
Et si nous le devenions tous ?
L'attention est présence.
Au visible et à l'invisible.
A l'audible et l'inaudible.
Au perceptible et imperceptible.
Au connu et à l'inconnu.
En soi et autour de soi.
L'attention est absence de tension.
Elle vient d'une détente absolue.
Du corps et du mental.
De la volonté et de la visée.
Elle est absence d'attente.
Et de jugements.
Elle est don et recevoir.
Elle est cet espace
D'être libre.
Elle est à choisir
Encore, toujours, à jamais.
Elle est le socle immatériel
Des possibilités
Entre le présent et le futur.
Elle est le bond de la création
Et l'universalité de notre être.
Comment en suis-je venue à m'interroger sur le mot 'essence' ?
Ah oui, j' étais avec l'énergie de 'sois toi et change ton monde' et surgit cette question : "Quelle est l'essence de ton être ?"
Et puis l'itinéraire de ce mot si précieux, si essentiel dans son sens premier 'le fond de l'être', si majestueux dans son sens second 'espèce d'arbre' et finalement réduit par la modernité pragmatique à sa forme la plus désenchantée, celle que nous pompons dans les stations service.
Alors, je me dis quelle gabegie, quelle déchéance, tout ça pour ça.
Et puis non, il n'y a pas que cela. Il n'y a pas que cette réduction ironique du mot 'essence' par l'humain moderne.
Bien sûr, rapidement je joue avec les sons - l'essence, les sens.
Et puis j'extrapole : essence, naissance et connaissance.
Et le mot 'essence' retrouve son espace, immense, sa légèreté aussi.
Il vit, il pétille.
Et je m'amuse à observer combien les mots n'en finissent pas de se faire l'écho des autres, de se répondre - ce qu'ils ont l'air de s'amuser, ils jouent à cache à cache, ils se miment les uns les autres, se donnent des airs de trompe-l'oeil.
Vraiment j'en suis à me demander s'ils ne font pas tout cela exprès, les mots, juste pour nous perdre dans leur labyrinthe - leur pied de nez à nos tentatives de les ranger dans des boîtes, elles-mêmes gardées dans des tiroirs, eux-mêmes alignés dans un meuble.
Cet enchâssement qui voudrait ordonner le jeu des mots et le chaos qu'ils sèment.
Et si c'était pour cela que les mots me sont si indispensables ?
A cause de leur indomptabilité, de leur implacabilité, de leur liberté éhontée et libertine, libertaire aussi, de leur beauté ineffable d'être hors définition car toujours, n'en déplaise aux Larousse, Quillet, Webster-Merriam, Longman et toute la clique, ils sauront déjouer les attendus et s'attifer différemment, imprévisibles toujours dans les sens qu'ils vont générer. Les mots sont des êtres formidables.
Et si nous nous inspirions d'eux pour mener notre vie ?
J'arpente l'allée des mots,
A la recherche d'effluves rares.
Là, sagement rangé sur un rayon,
Le mot Volupté.
Je le prends. Délicatement.
Je l'ouvre, verse sa rougeur,
A peine, une gorgée seulement.
Le goûte et le garde en bouche.
Et le fais tourner, lentement.
A dessein.
Danse des arômes. Tango des mots.
Motion, émotion.
Se dessinent velouté et volutes,
Vol et envol.
Douceur ondoyante et sinueuse.
Plaisir lent et opulent des sens.
Arabesques graciles et mouvantes,
Clés d'une vaste rêverie aimante.
Satisfaction, le ça qui me tisse
et me pousse à l'action.
Plaisir à la dérobée, à la Boucher.
Entre Escarpolette et Verrou.
Exquise extase.
Je m'abandonne à la magie de Volupté.
Ce mot est un miracle.
Connaissance : con-essence ; connais-sens ; co-nais-sens. Tu nais avec la connaissance de ton_essence, du sens de ta naissance, du sens ou des sens à emprunter et des sens qui te porteront et te transporteront. Magie de notre co-naissance. Nous nous co-naissons à nous-mêmes. Et si nous décidions d'être cette magie, encore et toujours ?
Connaître c'est aussi co-naître : naître avec ou en compagnie de...naître à soi, naître à la connaissance de soi, et si naître / n'être n'était que cela?...qu'est-ce que cela fait naître en toi ? qu'est-ce que tu veux bien connaître de cela ?